2019-11-29
 
Cette section est réservée aux membres du RQD

Les Patrimoines et la danse

Les Patrimoines et la danse

On observe fréquemment la confusion entre le «patrimoine de la danse» et la «danse dans le cadre du patrimoine immatériel». Qu’est-ce qui distingue ces deux notions et en quoi est-il important de les différencier? Pierre Chartrand nous livre ici un plaidoyer senti sur la nécessité de transmettre les techniques et répertoires traditionnels dans notre monde globalisé.

Deux notions bien distinctes

Le «patrimoine de la danse» s’entend comme l’ensemble des œuvres chorégraphiques d’artistes (par exemple: Joe de Jean-Pierre Perreault ou Carmina Burana de Fernand Nault), dont on vise la conservation et la mise en valeur, souvent par l’archivage, la documentation, peut-être par la reprise de l’œuvre qui est essentiellement vouée à la représentation scénique.

Ainsi la récente publication du RQD Du patrimoine de la danse au Québec, État des lieux, perspectives et conseils pratiques (2019) se penche essentiellement sur la conservation et la mise en valeur, l’archivage et la documentation du corpus chorégraphique québécois voué à la scène et ne traite pas de la danse comme patrimoine immatériel, tel que l’entendent l’UNESCO et la communauté internationale.

Par «danse traditionnelle comme élément du patrimoine immatériel» on désigne plutôt une pratique culturelle plus ou moins ancestrale liée à un territoire et à une population qui la reconnaît comme sienne. Par exemple, le Québec a reconnu, suite à l’adoption de sa nouvelle politique sur le patrimoine culturel en 2012, le chant de gorge inuit Katajjaq, la fabrication et la navigation des canots à glace dans la région de Québec ou la veillée de danse. L’Argentine et l’Uruguay ont pour leur part désigné le tango, la Guadeloupe, le gwoka et la France, le fest-noz breton. Ces désignations et reconnaissances visent essentiellement à préserver la culture traditionnelle de chaque pays et ainsi, la diversité mondiale des expressions culturelles.

La loi québécoise, tout comme la Convention de l’UNESCO pour la sauvegarde du patrimoine immatériel (2003), insiste par ailleurs sur la re-création permanente de ces pratiques culturelles. Loin de la préservation d’une œuvre chorégraphique datée et associée à une personne, on est plutôt ici dans un processus de transmission/recréation résultant de la vivacité des cultures populaires.

Espèces culturelles menacées

On connaît le nombre effarant d’espèces biologiques disparues dans les dernières décennies. Il en est de même des pratiques culturelles. Si nous ne prenons pas soin, par exemple, de transmettre et encourager la pratique de la gigue dans une mesure en 3/2, telle qu’elle s’est longtemps transmise chez les Québécois, les Canadiens-français et les Métis de l’Ouest, ce type de gigue sera chose du passé dans une génération. Elle ne sera qu’un objet muséal, constitué de quelques vidéos de collectes ethnographiques accompagnées de textes savants décrivant une pratique disparue.

J’ai personnellement eu la chance, en 1974, de rencontrer de fabuleux danseurs de La Baie (Saguenay) qui dansaient de façon exceptionnelle le Brandy et la Grande gigue simple. Cela a grandement marqué l’orientation de ma vie professionnelle. La survie de cette pratique tient dans les corps d’une poignée de danseurs québécois et de Métis de l’Ouest, dans sa version Red River Jig. Une ou deux centaines d’individus tout au plus, qui représentent en quelque sorte une «espèce culturelle menacée » au niveau planétaire.

Une source d’inspiration

Les cultures populaires traditionnelles sont aussi de grandes pollinisatrices de la création contemporaine. Elles représentent un courant de fond auquel s’abreuve chaque génération de créateurs: les ballets romantiques s’inspiraient des csardas, forlanes ou de danses écossaises; Fêtes Carignan (Brian McDonald) ou Rose LaTulippe (Eddy Toussaint), dans les années 1970, s’inspiraient de thèmes traditionnels; l’actuelle gigue contemporaine fait également référence à une pratique traditionnelle. Dans 30 ou 40 ans, une nouvelle forme de danse à la mode (néo ou post-contemporaine, pré-apocalyptique ou autre?…) ira également s’inspirer de ces pratiques populaires… si elles existent toujours.

Différentes prestations de la BIGICO à Tangente. Collection BIGICO

Les politiques nationales et internationales en patrimoine vivant/immatériel ont été instituées pour assurer la diversité culturelle de la planète, pour contrer l’uniformisation des cultures, «Pour la suite du monde»* et une humanité riche, variée, accueillant les danses traditionnelles de chaque pays et régions avec curiosité, bienveillance et sans préjugés.

 

Pierre Chartrand travaille comme interprète et médiateur en danse trad depuis plus de 45 ans. Sa carrière est vouée aux danses traditionnelles, particulièrement la danse trad québécoise et la gigue. Il a enseigné à quelques reprises au Bac en Danse de l’UQAM, a fondé le Centre Mnémo, et participé à la fondation du DEC en musique traditionnelle du Cégep de Joliette. Impliqué au Conseil québécois du patrimoine vivant depuis plus de 20 ans, il est également président de Danse traditionnelle Québec.

 

* Référence au documentaire de Pierre Perrault, Michel Brault et Michel Carrière.


Le patrimoine immatériel

Notice rédigée par le Conseil québécois du patrimoine vivant

Le patrimoine culturel immatériel est l’héritier des concepts de folklore ou d’arts et traditions populaires. Il est aussi appelé «patrimoine vivant» tant par ses porteurs québécois que par l’UNESCO. L’une des principales lignes de force de cette notion s’articule autour de la transmission de génération en génération, c’est-à-dire une forme de passation de façon orale ou par le geste (non exclusivement, mais prioritairement).

Le type de patrimoine dont on parle ici ne fait pas d’emblée référence à des archives, à des œuvres individuelles anciennes ou à l’histoire passée: il est d’abord incarné au présent à travers des pratiques sans cesse réactualisées par ses acteurs culturels, comme les danseurs traditionnels, par exemple. Il est généralement porté par des communautés ou des groupes de citoyens qui en sont les sujets principaux.

Une autre ligne de force du concept est la sauvegarde. Les politiques publiques et les instruments juridiques liés au patrimoine vivant ont en effet pour justification première l’idée de perpétuer des pratiques culturelles, afin notamment de freiner l’uniformisation du monde. Sauvegarde et patrimoine vivant vont donc de pair. D’où la nécessité pour les administrations publiques et les organismes de favoriser la tenue d’actions de formation, de production, de promotion, etc. pour assurer la vitalité et le développement des éléments culturels concernés.

Pour parler du concept, il est souvent utile d’éviter le terme légal «immatériel» et le faux débat qu’il engendre trop souvent entre matérialité et immatérialité. Car le patrimoine vivant n’est ni matériel ni immatériel. Il est plutôt constitué de pratiques et de savoir-faire transmis de génération en génération comme autant de traditions. Il est un flambeau.

Pour en savoir plus, consultez:

Pierre Chartrand à la gigue et Alexis Chartrand au violon. Festival: Montréal Baroque 2018. Photo: Claude Lebeuf

 

De la place des étudiants internationaux dans les écoles supérieures d’art du Québec

Il s’est dit bien des choses les dernières semaines au sujet des modifications unilatérales apportées par le gouvernement du Québec aux règles qui régissent le PEC (Programme de l’expérience québécoise) pour les étudiants internationaux désireux d’entamer une démarche d’immigration au pays après l’obtention d’un diplôme dans un programme d’études postsecondaires. Une décision décriée dans une rare unanimité au Québec ralliant ainsi partis d’opposition, milieu de l’éducation, monde des affaires, syndicats, chambres de commerce, observateurs de la scène politique et bien entendu, les étudiants eux-mêmes.

 

Quand la productivité et la rentabilité mènent le bal
À nos yeux, une chose est claire dans ce dossier. Le gouvernement fait preuve de méconnaissance et de méfiance à l’égard du caractère positif de l’apport des étudiants internationaux dans nos programmes d’études, mais aussi à la société québécoise dans son ensemble. Qui plus est, le caractère restrictif des formations admises au PEC envoie un drôle de message à tous ceux et celles qui désirent entreprendre ou poursuivre des études dans des programmes exclus de ladite liste. La catégorisation tacite des sphères d’études nous démontre où se situe le gouvernement dans son évaluation de l’employabilité au Québec. Il suscite un clivage entre les étudiants. Désormais, il y a ceux qui étudient dans des secteurs qui trouvent grâce aux yeux des législateurs et les autres «improductifs» que l’on doit quand même tolérer.

Alors que toutes les sociétés occidentales se livrent à une vive concurrence pour attirer et retenir les meilleurs candidats dans les programmes d’études supérieures, le Québec se retranche et s’isole derrière un aveuglement volontaire des réalités d’un marché de l’emploi qui fluctue constamment. Aujourd’hui, quels devins pourraient nous dire quels seront les emplois les plus recherchés dans cinq ans?

 

Pour une meilleure reconnaissance de la valeur des formations artistiques
À titre de directeur général de l’École de danse contemporaine de Montréal (EDCM) et de président de l’Association des écoles supérieures d’art du Québec (ADESAQ), je ne peux demeurer silencieux devant les enjeux que soulèvent les nombreuses ramifications du débat actuel. Les écoles supérieures d’art jouent un rôle important dans l’écologie de la formation en art au Québec. En tant que centres d’excellence dans la formation de la relève artistique, les écoles supérieures d’art contribuent de façon majeure au perfectionnement et au renouvellement des pratiques artistiques, ainsi qu’au dynamisme et au rayonnement international de la culture québécoise.

Nos écoles se démarquent au Canada et sur la scène internationale pour de nombreuses raisons. Parmi celles-ci, notons leurs approches pédagogiques et leur niveau d’excellence et d’exigence en matière d’enseignement des différentes disciplines artistiques. Elles offrent un enseignement de haut niveau, axé sur le cheminement individuel de leurs étudiants. Elles offrent des conditions d’apprentissage qui font l’envie de plusieurs écoles internationales. Nos écoles sont des creusets d’où naissent de nombreuses carrières exceptionnelles.

Les conditions et exigences professionnelles auxquelles seront confrontés les étudiants à leur sortie des écoles sont ainsi reproduites tout au long de leur formation. Les praticiens qui dispensent l’enseignement composent également le premier réseau de contacts professionnels pour les jeunes diplômés.

 

L’opportunité de former les travailleurs du Québec de demain
Les diplômés des écoles d’art ont une compréhension profonde de leur métier, et sont d’ailleurs très reconnus par le milieu comme en témoignent les taux de placement élevés, leur participation à des créations marquantes. Cela confirme la capacité des écoles supérieures d’art à former des artistes et des artisans aux compétences élevées et recherchées ici et ailleurs. Ils constituent de loin nos meilleurs ambassadeurs.

Depuis quelques années, plusieurs écoles accueillent un nombre de plus en plus important d’étudiants internationaux dans leurs programmes. Ces jeunes apprentis sont attirés par la qualité des formations offertes et par les opportunités de poursuivre une carrière d’interprète ou de créateur en sol québécois. L’accueil des étudiants internationaux présente de nombreux avantages pour le Québec. «…les étudiants internationaux contribuent largement aux progrès de la société québécoise. Ils diversifient les idées et les collectivités, renforcent les relations entre le Québec et des établissements d’enseignement du monde entier, tout en favorisant l’attraction des enseignants internationaux convoités. Leur présence permet de rehausser le niveau et la qualité des établissements d’enseignement québécois».*

Les diplômés qui sortent de nos écoles se produisent régulièrement sur la scène internationale et contribuent largement au rayonnement et à l’attractivité de celles-ci à travers le monde. Plusieurs écoles jouissent d’une réputation qui dépasse les frontières de Montréal, du Québec ou même du Canada, et peuvent ainsi recruter des étudiants et enseignants de calibre mondial.

Aussi, il nous apparaît évident que les étudiants internationaux qui sortent de nos écoles supérieures d’art devraient continuer de constituer l’une des principales sources d’immigration, car ils possèdent un diplôme déjà reconnu par les employeurs et une expertise en tant que créateurs. De plus, ils connaissent aussi la réalité québécoise et ont déjà bâti un réseau de contacts dans leur communauté de pratique.

 

Une stratégie gouvernementale à clarifier
Les principaux bailleurs de fonds publics qui contribuent aux financements respectifs de nos écoles accordent une grande importance à notre capacité d’accueillir dans nos programmes des étudiants extraterritoriaux. À la lumière des dernières actions du gouvernement dans ce dossier, il y a lieu de se questionner sur l’harmonisation des positions des différents ministères entre eux afin de tenir un discours cohérent qui ne laisse place à aucune interprétation. En terminant, force est de constater que le Québec manque cruellement d’une stratégie internationale en matière d’éducation. La voie que semble privilégier pour l’instant le gouvernement fera en sorte qu’à plus ou moins brève échéance, le Québec sera déclassé dans le contexte de concurrence mondiale pour attirer les meilleurs talents.

Dès lors, malgré le retrait annoncé du nouveau règlement, nous ne pouvons accepter que seuls les aspects économiques et l’employabilité dictent les politiques d’immigration au Québec. Ce serait faire fi des nombreux avantages et retombées que les étudiants internationaux génèrent au profit de la société québécoise. Une plus-value dont nous ne saurions nous priver. Nous invitons les législateurs à consulter les principaux acteurs du domaine de la formation en art et du milieu de l’éducation avant d’aller plus loin avec une prochaine mouture de politique nationale d’immigration. Un consensus est préférable à une vision étriquée et à courte vue des besoins réels du marché de l’emploi.

 

 © Luc Lavergne

Yves Rocray
Directeur général
École de danse contemporaine de Montréal

 

 

 


* Attirer et retenir plus d’étudiants internationaux – Six propositions pour renverser la tendance au Québec – Institut du Québec en partenariat avec le Conference Board du Canada et HEC Montréal, 2017

Une bande dessinée pour sensibiliser au harcèlement en danse

Montréal, le 20 novembre 2019. Après la production d’une volumineuse trousse de prévention du harcèlement en danse, le Regroupement québécois de la danse (RQD) poursuit ses actions de sensibilisation en publiant la bande dessinée Danser, ce n’est pas tout accepter!. Une dizaine de situations problématiques vécues en contexte de formation et de pratique professionnelle y sont mises en scène par l’illustratrice Sarah Arnal pour faciliter l’identification de comportements abusifs dans ce domaine où le travail du corps, le dépassement des limites physiques et mentales et la précarité sont d’importants facteurs de risque de violences psychologiques et sexuelles. L’œuvre présente une réalité complexe sans fard et sans détour avec l’espoir d’inciter organismes, institutions et individus de tous âges à développer une culture du consentement. Soutenue financièrement par la CNESST et le Conseil des arts de Montréal, disponible en français et en anglais sur le site du RQD, elle pourrait aussi avoir un impact dans les secteurs du loisir, des arts du corps et du sport.

En préparation depuis le printemps dernier, la bande dessinée aborde des situations problématiques identifiées par une cinquantaine de membres du RQD lors d’un atelier sur l’éthique des relations professionnelles: violences verbales et physiques, sexisme, grooming, voyeurisme et autres. Le médium de la bande dessinée a paru particulièrement approprié au RQD pour aborder ces sujets sensibles et interpeler autant les adultes que les plus jeunes. L’illustratrice Sarah Arnal s’est distinguée, parmi une soixantaine de candidats pour la réaliser, par sa compréhension du sujet, sa sensibilité, la qualité et la poésie de ses illustrations et par sa démarche artistique axée sur la tension entre des illustrations de la pratique de la danse et un récit brut des violences vécues. Un groupe de professionnels de la danse, une avocate et une intervenante psychosociale ont été consultés pour valider les orientations de la bande dessinée au tout début d’un processus exigeant.

 

 © Sarah Arnal

Sarah Arnal
Illustratrice, enseignante, graveuse et auteure de romans graphiques, Sarah Arnal vit à Québec et mène actuellement des travaux à la croisée des sciences sociales et des arts graphiques. Diplômée de l’École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs de Paris, elle a également dirigé le pôle édition-estampe de l’École Supérieure d’Arts et de Design de Saint-Étienne. Elle a notamment signé La première fleur du pays sans arbres, bande dessinée scénarisée par Julien Lacombe et publiée aux éditions Les Requins Marteaux.

 

Le Regroupement québécois de la danse
Le RQD rassemble et représente les individus et organismes professionnels œuvrant en danse, dans le but de favoriser l’avancement et le rayonnement de l’art chorégraphique et de contribuer à l’amélioration des conditions de pratique en danse.

Pour développer une plus grande sensibilité individuelle et collective aux situations de harcèlement et assurer des milieux d’apprentissage et de travail sains, le RQD s’est engagé à promouvoir l’éthique des relations professionnelles au sein de la communauté de la danse professionnelle. Entre autres actions, il a embauché une chargée des relations professionnelles de février 2018 à juin 2019, publié des articles dans son infolettre et son fil de presse, invité des artistes à s’exprimer sur le sexisme et sur le mouvement #Metoo et produit une trousse de prévention du harcèlement.

 

Consulter Danser, ce n’est pas tout accepter!

Également disponible gratuitement sur le site du RQD

  • Trousse Prévenir le harcèlement et autres violences, comprenant les sections Portrait de la situation en danse; Identifier et nommer les situations d’abus; Répertoire de ressources spécialisées; Outils pour les organismes.

– 30 –

Source et demandes d’entrevue
Coralie Muroni, directrice des communications, 514 849-4003, poste 222.

Trois administrateurs cooptés au CA du RQD

Chaque année, les administrateurs élus complètent le conseil d’administration (CA) en cooptant trois personnes aux expertises complémentaires pour des mandats d’un an. Dans une optique de renouvèlement, le CA est heureux de compter sur le dynamisme et l’implication de Lucy Fandel, interprète et chorégraphe, et de Nicolas Patry, interprète, enseignant et directeur des répétitions. Tous deux effectueront leur tout premier mandat, tandis que l’avocate Amanda Gravel reconduira le sien pour apporter son expertise en droit à l’équipe ainsi formée de 13 administrateurs.

Sous la coprésidence renouvelée de Jamie Wright et Lük Fleury, le conseil d’administration 2019-2020 du RQD compte également les nouvelles élues Isabelle Poirier et Bettina Szabo et les administrateurs déjà en poste Fannie Bellefeuille, François Bellefeuille, Annie-Claude Coutu Geoffroy, Marie Mougeolle, Dorian Nuskind-Oder et Georges-Nicolas Tremblay. Réunissant les expertises de personnes aux parcours, professions et horizons culturels variés, le RQD a confiance que la prochaine année se poursuivra sous le signe de l’ouverture, de l’inclusion et du mieux vivre ensemble et qu’il continuera ses avancées dans l’amélioration des conditions socio-économiques du secteur de la danse.

Voir les profils des administrateurs du RQD

 

Danse décontractée: plaidoyer pour l’accessibilité

Depuis 2018 se multiplient les initiatives d’accessibilité et d’inclusivité à travers les différents réseaux professionnels artistiques montréalais. Cette réflexion découle d’un désir d’ouvrir les portes des lieux culturels au plus grand nombre, d’une part, mais aussi au besoin de démocratiser réellement l’accès à la culture. Au printemps 2019, le réseau Accès culture mettait sur pied un projet pilote au sein de certaines maisons de la culture afin d’offrir quatre représentations décontractées accessibles à l’ensemble de la communauté montréalaise, incluant le spectacle de danse Vic’s Mix, de la compagnie RUBBERBAND, présenté à la maison de la culture du Plateau Mont-Royal. De quoi s’agit-il? Quelle en est la portée?

 

Élargir les publics
Une représentation décontractée (de l’anglais «relaxed performance») désigne une représentation ouverte à tous, particulièrement aux personnes qui vivent avec un handicap sensoriel ou intellectuel, un trouble neurologique ou d’apprentissage, et aux personnes accompagnées de nouveau-nés. L’ambiance sonore et visuelle du spectacle ainsi que l’accueil sont adaptés pour créer un environnement calme et inclusif.

Les représentations décontractées ont fait leur apparition dans les années 90, principalement dans les théâtres et salles de cinémas anglo-saxons. Au Québec, les premières initiatives sont récentes, mais elles gagnent en popularité, par exemple à l’Espace Libre, à l’Arrière Scène en Montérégie, au MAI (Montréal , arts interculturels), à l’Agora de la danse et dans certains musées de l’île de Montréal. Si ces représentations étaient historiquement principalement offertes au théâtre, il était important pour le réseau Accès Culture, d’explorer cette avenue dans d’autres disciplines afin d’ouvrir la voie à d’autres compagnies qui aimeraient se lancer dans l’aventure. Avec le soutien du British Council ou du Conseil des arts de Montréal, notamment, ces initiatives se multiplient maintenant et piquent la curiosité d’un nombre grandissant d’acteurs des milieux artistiques.

 © Jérémie Leblanc

Pourquoi offrir une représentation décontractée?
Littéralement, parce que cela change des vies. Certaines personnes n’ont présentement pas accès à la culture en raison du cadre traditionnel de représentation ou du manque d’adaptation des lieux culturels à leurs besoins. En effet, nous attendons de chaque spectateur qu’il sache comment se déroule un spectacle : la pénombre dans la salle, ne pas parler, ne pas bouger, ne pas sortir, etc. Pour un grand nombre de personnes, ces contraintes nuisent à leur accès aux arts de la scène.

Lors des représentations décontractées, les lumières demeurent partiellement allumées dans la salle. Les gens peuvent entrer et sortir à leur aise, peu importe la raison. Nous ne nous attendons pas à un silence complet ni à ce que chacun reste en place tout au long du spectacle. Aussi, nous diminuons l’intensité sonore et lumineuse pour les personnes à la perception plus sensible. Et l’œuvre, au centre de l’expérience, demeure inchangée. Il est de notre responsabilité, en tant qu’artistes ou diffuseurs, d’être à l’écoute des besoins de chaque personne, de les accompagner et ainsi favoriser leur expérience parmi nous. La communication est la clé, il s’agit ici de bâtir une relation avec chaque membre du public ou avec des organismes spécialisés avec ces clientèles souvent marginalisées. Et lorsque ce travail est fait, les résultats sont perceptibles rapidement.

 © Jérémie Leblanc

L’essayer c’est l’adopter
Combien de spectateurs ayant des besoins particuliers tout au long du projet sont venus nous remercier de les sortir de l’isolement, de leur donner la chance d’avoir accès à des œuvres qu’elles n’auraient pu apprécier autrement? Toute la raison d’être de ce projet tient en ces quelques mots. Parce qu’au fond, en tant que compagnie, artiste ou diffuseur, on en vient toujours à se poser la même question : à qui est-ce que je m’adresse à travers mon travail? Pour plusieurs artistes que je connais, nous travaillons à dialoguer avec la société dans laquelle nous vivons, avec l’ensemble de la communauté. Mais parvenons-nous vraiment à nous adresser à elle avec les contraintes actuelles autour de la représentation? Avec la représentation décontractée, on poursuit la réflexion avec une deuxième question : comment rendre notre travail artistique accessible à un plus grand nombre et assurer ce dialogue qui nous intéresse en tant qu’artistes?

Le milieu de la danse s’ouvre visiblement aux démarches inclusives. Nous avons tous un rôle à jouer pour éduquer nos collègues et nos publics afin de poursuivre le dialogue autour des questions d’accessibilité. L’expérience de Vic’s Mix en format «décontracté» nous prouve que nous avons tous les moyens et les ressources pour aller de l’avant avec ce type d’initiative. Ainsi, au printemps 2020, près d’une vingtaine de représentations décontractées de différentes disciplines seront présentées dans les lieux du réseau Accès culture. Dans l’avenir, les représentations décontractées seront plus fréquentes et diverses, permettant d’offrir une réelle programmation accessible à l’ensemble de notre communauté.

 

 © Maxime Côté

Pascale St-Onge est une autrice dramatique et une librettiste basée à Montréal. Depuis sa sortie de l’École nationale de théâtre du Canada en 2016, elle multiplie les projets tels que les spectacles collectifs Agora et Autorisation parentale, présentés au Festival du Jamais Lu. En octobre 2018, elle présente le spectacle KINK, spectacle performatif co-créé et interprété avec son complice Frédéric Sasseville-Painchaud. En 2018, elle remporte le Prix Trois Femmes – Mécénat Musica en tant que librettiste pour la création de l’opéra contemporain «L’hiver attend beaucoup de moi», composé par Laurence Jobidon et qui sera produit par l’Opéra de Montréal et l’Atelier Lyrique à l’hiver 2020, à Espace Go, dans une mise en scène de Solène Paré. Elle s’intéresse aux questions d’accessibilité culturelle et s’implique à cet effet auprès de la compagnie théâtrale Joe Jack et John et du réseau Accès culture comme coordonnatrice.

Le réseau Accès culture, c’est plus de 2000 spectacles et 150 expositions gratuits ou à petits prix présentés annuellement dans les 19 arrondissements de Montréal. Des événements qui mettent en valeur la musique, la danse, le théâtre, le cirque, le cinéma et les arts visuels, mais aussi et surtout une foule d’activités de médiation et d’accompagnement des publics.

Le harcèlement en danse sous la loupe des médias

Entre cinq articles et une entrevue radiophonique, le sujet du harcèlement en danse a été abordé dans quatre médias la semaine dernière, suscitant de nombreuses réactions et beaucoup d’émotions. La bête médiatique étant ce qu’elle est, on a pu déplorer un certain nombre de raccourcis, d’erreurs factuelles, de propos déformés[1], de clichés[2], de maladresses et de choix éditoriaux livrant un portrait du milieu de la danse sombre, sans nuances et sans grande perspective. Sachant que le sujet reste tabou et que la libération de la parole est une clef pour la généralisation de pratiques non violentes, voyons ce qu’il pourrait ressortir de bon de cet étalage médiatique.

 

Toute sortie publique d’affaires de harcèlement et d’agressions sexuelles réveille de vieilles douleurs, délie les langues, exacerbe les besoins de justice et de réparation. Cela est légitime et souligne le manque de ressources d’accueil et d’accompagnement des victimes du secteur de la danse où, rappelons-le, les frontières des comportements acceptables sont floues et mouvantes, où les délits sont peu dénoncés et où les victimes trouvent peu de baume à appliquer sur des plaies qui restent bien souvent béantes. Cela souligne aussi le désir et la nécessité de mettre en œuvre des mécanismes pour garantir des espaces d’apprentissage et de travail sains et sécuritaires.

En réponse au sentiment d’impuissance et de colère lié au fait que des individus connus pour leurs comportements répréhensibles continuent d’œuvrer librement dans le milieu de la danse et que les peines infligées aux rares accusés sont généralement trop légères, certains voudraient pouvoir cataloguer et exclure les agresseurs sans nécessairement passer par de longs et lourds processus judiciaires dont une victime, il faut le dire, n’est jamais sûre de ressortir gagnante ni indemne. On ne peut cependant ignorer les risques inhérents aux actions de justice populaire qui génèrent leur lot de dommages collatéraux sans pour autant apporter le réconfort ni la sécurité espérés. Pour être gagnée, la lutte contre les violences doit se mener collectivement et au grand jour.

Des lois existent et qui veut agir efficacement se doit de les connaître, de même que les termes précis pour qualifier les choses. La recommandation s’applique notamment aux journalistes séduits par les sirènes du sensationnalisme. À ce titre, la section Identifier et nommer les abus de la trousse de prévention publiée en juin dernier par le Regroupement québécois de la danse (RQD) aide à distinguer une incivilité, un incident malheureux ou un simple conflit d’un acte légalement répréhensible. La bande dessinée Danser, ce n’est pas tout accepter! – que l’organisme dévoilera avant la fin du mois – devrait aussi sensibiliser les élèves, les étudiants et les professionnels de la danse à ce qui peut constituer une situation problématique. En cas de doute, tout interprète peut s’adresser à l’Union des artistes (UDA) et toute victime du secteur culturel peut profiter des services juridiques gratuits et confidentiels de L’Aparté – cité en tête des 15 organismes du Répertoire de ressources spécialisées de la trousse de prévention qui comprend aussi un Portrait de la situation en danse et des Outils pour les organismes.

Une association comme le RQD n’a ni l’autorité ni le pouvoir d’enquêter, de dénoncer, de juger ni même de sévir. Son rôle se résume à sensibiliser sa communauté aux problèmes qui peuvent nuire à ses membres, à l’outiller pour y remédier et à orienter les personnes qui s’adressent à lui. En plus des outils qu’il a déjà produits, des textes qu’il a publiés notamment dans sa rubrique Les Échos du milieu, des ateliers ou formations qu’il a offerts et des mesures de prévention qu’il applique à l’interne, l’organisme choisit de prendre position publiquement en répondant par exemple aux demandes d’entrevue. D’une part, parce qu’il a pour mission d’œuvrer à l’amélioration des conditions de pratiques des artistes et des travailleurs culturels et que cela touche entre autres à l’éthique des relations professionnelles. Aussi, parce qu’il s’avère que la lutte contre le harcèlement et les agressions sexuelles passe par une parole libre et franche. Et plutôt que de faire porter aux seules victimes le poids de l’évolution des mœurs et des comportements en les exhortant à se rendre devant les tribunaux, le RQD encourage chaque individu à questionner d’emblée toute demande ou tout comportement qui lui semblerait inadéquat et à manifester tout inconfort face à une situation qui lui semblerait problématique, même s’il n’en est pas la cible directe. Les témoins ont un grand rôle à jouer pour relever le défi d’enrayer la violence et son cycle infernal. Et pour ce faire, la communication est un outil précieux. Nous avons besoin d’écoute et de solidarité pour développer et instaurer, collectivement, une culture du consentement. Là est notre plus grand pouvoir.

Fabienne Cabado
Directrice générale du Regroupement québécois de la danse

 

 

 


[1] Un article publié par l’Agence QMI sur le site de TVA nouvelles et dans le Journal de Montréal en écho à l’entrevue donnée par la directrice générale du RQD à QUB Radio déformait les propos de cette dernière dans une formulation préjudiciable tant pour l’organisme que pour les professionnels œuvrant en danse classique. Le RQD a demandé à ce qu’elle soit corrigée. À l’heure d’écrire ces lignes, il n’avait pas encore obtenu satisfaction.

[2] Toutes les illustrations choisies par les rédactions sont des images de danse classique, comme si la danse se résumait au ballet.

AGA 2019: bilan d’une année productive et renouvèlement du CA

Près d’une centaine de membres se sont rendus à Circuit-Est centre chorégraphique le 25 octobre dernier, pour prendre part à l’assemblée générale annuelle (AGA) du Regroupement québécois de la danse. La jeune génération était présente en grand nombre, témoignant de son engagement et de son intérêt pour les enjeux qui animent le milieu de la danse professionnelle, à l’instar des fidèles au rendez-vous, dont certains viennent depuis plus de 20 ans. Tous ont pu être informés des avancées de plusieurs dossiers d’importance menés par le RQD en 2018-2019, suite à quoi ils ont été invités à élire cinq administrateurs.

 

Panorama des dossiers phares de l’année au RQD

En plus de faire état des bons coups réalisés par chacun des services du RQD et d’annoncer un record d’adhésions, soit 571 membres, l’AGA a permis de présenter officiellement la mission du RQD, récemment reformulée pour gagner en clarté et dans une perspective d’inclusion.

Afin d’adopter des pratiques équitables et en cohérence avec ses nombreuses actions de représentation pour l’amélioration des conditions socioéconomiques dans l’ensemble du secteur, le RQD a été très actif en concertation en soutenant plusieurs projets d’études et il a travaillé sur la mise en place d’une structure et d’une grille salariale, dont le processus et les lignes directrices ont été présentés à l’assemblée. Des membres ont salué l’exemplarité de cette démarche et manifesté un intérêt à s’en inspirer.

Autre enjeu ayant mobilisé l’équipe et le conseil d’administration, la planification stratégique, dont le coprésident en poste Lük Fleury a listé les grandes orientations pour les trois prochaines années.

 

Conseil d’administration et coprésidence renouvelés

Dans le collège des membres individuels, une saine compétition a reflété l’intérêt des artistes à s’impliquer dans l’association. Le mandat de Jamie Wright, interprète, enseignante et directrice des répétitions a été reconduit tandis que deux nouvelles administratrices ont été élues pour une première fois: l’interprète, enseignante et directrice des répétitions Isabelle Poirier et l’interprète et chorégraphe Bettina Szabo, toutes deux très fières de rejoindre les bancs du CA pour deux ans. Du côté des membres corporatifs, les administratrices Fannie Bellefeuille, directrice générale de RUBBERBAND et Annie-Claude Coutu Geoffroy, coordonnatrice du volet Danse au Théâtre Hector-Charland, ont été élues par acclamation pour renouveler leur mandat. Toutes siègeront aux côtés des administrateurs déjà en poste Lük Fleury, François Bellefeuille, Marie Mougeolle, Dorian Nuskind-Oder et Georges-Nicolas Tremblay.

Ces dix administrateurs auront pour première tâche de coopter trois autres personnes pour compléter le conseil d’administration.

Annie-Claude Coutu Geoffroy, François Bellefeuille, Fannie Bellefeuille, Bettina Szabo, Dorian Nuskind-Oder, Jamie Wright et Lük Fleury © Sylvie-Ann Paré

 

Le RQD salue particulièrement aujourd’hui les administrateurs sortants Adrien Bussy, Miriam Ginestier, Axelle Munezero, Angélique Willkie et l’avocate Amanda Gravel, qui ont généreusement apporté expertise et passion tout au long de leur mandat.

En vote à main levée, les membres ont recommandé à l’unanimité de reconduire la coprésidence de Jamie Wright et de Lük Fleury pour une troisième année consécutive, réaffirmant ainsi la volonté de multiplier les ponts entre les communautés francophone et anglophone et de valoriser la parité homme-femme et la diversité artistique. Les coprésidents ont manifesté leur enthousiasme à l’idée de poursuivre ce «travail en tandem.»

 

Retour sur l’atelier du RQD sur le numérique

Il séduit autant qu’il inquiète. Il comble des besoins et en crée de nouveaux. Déjà bien présent dans le milieu de la danse, le numérique reste un concept encore bien flou pour certains, quand d’autres s’en désintéressent tout simplement. D’où l’importance de l’atelier sur le numérique du Rendez-vous annuel des membres, offrant l’occasion de découvrir les projets numériques en cours dans le secteur, d’entamer une réflexion collective sur les modèles et projets à développer pour la communauté de la danse et de faire ressortir des pistes d’actions. Coup d’œil sur les contenus de l’atelier.

Atelier du RDV annuel des membres du RQD 2019 © Sylvie-Ann Paré

Retrouvez dans ce document, un résumé de cet atelier:

  • 6 projets/initiatives numériques de professionnels du milieu, enrichis de réflexions et de commentaires.
  • Une présentation du mandat de l’agente de développement culturel numérique en danse.
  • Les avantages, obstacles, opportunités et contraintes du virage numérique dans le milieu professionnel de la danse (tirés du sondage envoyé aux membres en amont de l’atelier)
  • Des premières pistes d’action, fruits d’échanges en groupe entre les professionnels en danse.

Le RQD publiera ultérieurement une analyse plus approfondie des actions individuelles et collectives nommées en atelier, à partir desquelles il identifiera les initiatives à mener prioritairement dans le milieu de la danse.

Pour toutes questions, veuillez contacter votre agente de développement culturel numérique, Sophie Trolliet-Martial.

Cliquez sur l’image pour accéder à la présentation:

Atelier sur la décolonisation du terme d’art chorégraphique

C’est sous la forme d’un cercle de parole réunissant plus d’une trentaine de membres que le RQD a ouvert une importante discussion sur l’art chorégraphique au RDV annuel des membres. En résonance avec la mission du RQD récemment reformulée, dans laquelle le concept rassembleur d’«art chorégraphique» a remplacé celui de «danse de création, de recherche et de répertoire», la réflexion s’est ouverte sur ces questions: comment définir l’art chorégraphique en 2019? Comment élargir la vision occidentalocentriste qui le fonde pour faire tomber les barrières systémiques qui nuisent encore au plein déploiement de nombreux professionnels de la danse? Échanges de visions et perceptions, parfois complémentaires, parfois contrastées, ont permis d’entamer dans le plus grand respect un dialogue nécessaire et encore à poursuivre. Un retour plus substantiel sur ces échanges sera publié dans les prochaines semaines. Et on vous donne déjà rendez-vous le 2 décembre prochain pour notre 6e cercle de parole.

Rapport d’activités 2018-2019 du RQD

Intense et riche en défis, l’année 2018-2019 été marquée par un travail en profondeur pour inscrire l’éthique, l’équité et l’inclusion dans les pratiques du RQD et du milieu de la danse. Entre une nouvelle planification stratégique, la refonte du portail Québec Danse, l’augmentation de l’enveloppe dédiée à la formation professionnelle, les partenariats numériques, la publication d’un ouvrage bilingue sur le patrimoine de la danse et d’un lexique commenté sur les enjeux de l’inclusion en danse, l’année a été exceptionnellement active et structurante. Bilan en mots et en images.

Lire le rapport