Considérations postélectorales
À quelques jours des élections qui ont porté au pouvoir la Coalition Avenir Québec (CAQ), la question se pose du sort qui sera réservé aux arts au cours des quatre prochaines années. Faut-il fonder des espoirs pour l’avenir de la culture quand le premier ministre François Legault énonce qu’il souhaite œuvrer à un «changement positif pour tous, faire mieux pour tous les Québécois»? Faut-il craindre qu’il considère les arts comme la dernière des priorités quand il s’engage à «remettre de l’argent dans le portefeuille des contribuables» tout en affirmant que son parti a «le cœur à la bonne place, mais les deux pieds sur terre»? Le point sur ces questions.
Bien que le dossier de la culture n’ait guère été discuté sur la scène publique et médiatique, la CAQ a affiché en fin de campagne l’engagement de veiller au déploiement de la nouvelle Politique culturelle du Québec et au maintien des crédits associés à son plan d’action. La députée caquiste présente à la rencontre-débat du 24 septembre dernier, madame Claire Samson, l’a confirmé. Elle a précisé toutefois qu’elle ne voulait pas mentir en promettant d’atteindre la cible de 2% du budget provincial que nous souhaitons voir attribués à la culture. Il nous faudra donc rester mobilisés pour défendre ce point majeur.
Madame Samson a par ailleurs insisté sur l’importance de faire de Télé-Québec le fer de lance de la diffusion de la culture québécoise, de protéger le patrimoine bâti et la liberté de création, de rénover les bibliothèques scolaires et d’offrir à tous les élèves deux sorties culturelles annuelles. Dans la perspective de faire de l’école une voie d’accès privilégiée pour les arts et la culture, le programme caquiste prévoit aussi une heure hebdomadaire supplémentaire au secondaire pour des activités parascolaires qui pourraient être artistiques. Il nous faudra suivre ce dossier de près et continuer de militer pour une meilleure intégration des arts à l’école.
Le virage numérique compte parmi les trois autres grandes orientations de la CAQ en matière de culture, avec des actions qui concernent peu les arts de la scène. Il nous faudra notamment éclaircir pourquoi la révision des lois sur le statut de l’artiste ainsi que l’attribution au CALQ des ressources nécessaires pour l’accomplissement de son mandat ne sont reliées qu’au virage numérique et veiller à ce que le soutien à la création et à la diffusion soit mieux assuré. Car, même avec le maintien des investissements prévus, il manque encore quelque 27 M$ pour la satisfaction de tous les besoins des clientèles du CALQ. Il nous faudra aussi profiter du désir de la CAQ de miser sur la culture comme moteur économique de toutes les régions pour dynamiser l’émergence et le développement de pôles et de foyers de danse sur l’ensemble du territoire. À noter, enfin, qu’au chapitre de la diversité culturelle, la CAQ concentre son attention sur les cultures autochtones et sur une meilleure représentativité dans les manifestations culturelles.
Le suspens demeure entier concernant l’identité de notre future ministre. Quoiqu’il advienne, il nous faudra reprendre notre bâton de pèlerin pour l’informer des enjeux communs dans le secteur culturel et des réalités particulières des différentes disciplines artistiques. Parallèlement, il nous faudra œuvrer avec ardeur à la valorisation de nos artistes et de leurs créations et miser sur l’action citoyenne pour sensibiliser l’ensemble de la population à la fonction cruciale des arts dans la société et à la nécessité d’en soutenir adéquatement les artisans et les œuvres. Un vaste programme, considérant que la question des conditions socioéconomiques des acteurs du secteur culturel semble dans l’angle mort des élus de la CAQ.
Fabienne Cabado
Directrice générale du Regroupement québécois de la danse